
Vendredi 3 février, le ministre de la Santé François Braun a promis la fin, d’ici à deux semaines, de la pénurie de certains médicaments tels que l’amoxicilline, un antibiotique qui manque cruellement dans les pharmacies.
“Plus jamais ça !”, déclarait-il au micro d’Europe 1. À Marseille, certains pharmaciens désespèrent. Les boîtes de corticoïdes, d’antibiotiques et de paracétamol (dans sa version pédiatrique) manquent à l’appel sur leurs étagères, et ce, depuis plus d’un mois.
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« Ça dépend des livraisons et des dotations »
« On ne peut pas donner les traitements à environ un patient sur deux », explique Amélie, préparatrice à la pharmacie du Palais dans le 6e arrondissement. « Ça dépend des livraisons et des dotations », nuance-t-elle.
Car pour que le peu de boîtes d’antibiotiques ne soit pas concentré dans une seule pharmacie, l’État a mis en place un système de dotation. Les médicaments comme l’amoxicilline, l’antibiotique le plus prescrit dans le pays, sont rationnés, selon les stocks.
Pourquoi y-a-t-il une pénurie ?
Les causes de la pénurie de médicament sont multiples.
– Du côté de l’offre : la majorité des matières premières pharmaceutiques est produite en Inde et en Chine. Or, ces pays ont connu de fortes restrictions sanitaires, ce qui ralentit la production. De son côté, la guerre en Ukraine freine la production de verre, de carton et d’aluminium, qui sont utilisés pour l’empaquetage.
– Du côté de la demande : l’explosion des cas de Covid-19 et de grippe augmente fortement les besoins en médicaments depuis le début de l’année. Cette hausse de la demande s’est faite d’autant plus ressentir chez les plus jeunes en raison d’une épidémie de bronchiolite hors norme.
« Nous, on a eu de la chance, on avait pas mal de stocks pour les corticoïdes », remarque Sophie, préparatrice dans la pharmacie Sibourg, à quelques rues de là. Elle estime pouvoir délivrer les traitement approximativement deux fois sur trois.
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Les médecins contraints de modifier les traitements
« Le plus compliqué, c’est de gérer les parents stressés pour leurs enfants », détaille-t-elle. Car si le paracétamol en comprimé de 1 000 mg manquait en début d’année, ce sont aujourd’hui les formes pédiatriques (en tube ou en sachet) qui sont difficiles à trouver.
« Là où ça devient grave, c’est pour les gens qui ont besoin d’un injectable pour un examen. Si on ne l’a pas en stocks, ils doivent annuler leur rendez-vous qu’ils ont parfois pris depuis longtemps »
Ces pénuries poussent les pharmaciens à rediriger les patients vers d’autres confrères très régulièrement. Lorsqu’ils savent que c’est peine perdue, les préparateurs appellent directement les médecins pour leur demander de changer de traitement.
Or, pour Hubert, qui tient lui aussi une pharmacie dans le 6eme arrondissement, « les médecins ont connaissance des pénuries, ils devraient prescrire les médicaments en conséquence ».
« Je suis pharmacien, pas coiffeur »
Pour le pharmacien, « c’est à l’hôpital de prendre le relai« . Il a lui-même travaillé dans un CHU auparavant et ne comprend pas pourquoi les patients n’y sont pas automatiquement dirigés. « Les hôpitaux ont des stocks bien plus importants et bénéficient de plus grosses dotations, c’est là-bas qu’il faut aller ! », s’indigne-t-il.
Entre deux coups de fil avec son fournisseur, il s’impatiente : « Regardez ! Ils viennent de me dire qu’ils ont reçu 24 boîtes de paracétamol en dosette enfant. Ce même fournisseur livre plus de 1 000 pharmacies ! »
Face à cette situation dramatique, Hubert ne sait plus que faire. Il devait être de garde le week-end précédent, il a décidé de ne pas l’assurer. « Il est hors de question que je travaille 12h pour vendre des shampoings. Je suis pharmacien, pas coiffeur », soupire-t-il, visiblement à bout.