
Douze ans après la crise qui a manqué faire disparaître l’ADMR du Lot, voici à présent une nouvelle partie de bras de fer entre l’association départementale d’aide à domicile qui réclame au Département du Lot des fonds, qui ne lui auraient pas été versés…
« Après l’opération de casse de l’ADMR du Lot menée en 2010 par le Conseil départemental du Lot, pour créer une société d’économie mixte dénommée « Lot Aide à Domicile » (LAD), nos relations avec la collectivité départementale s’étaient globalement apaisées », souligne Michel Gaston, président de l’ADMR du Lot. Retournement de situation à la mi-novembre 2021, avec le vote des élus du Département du Lot s’opposant au Décret du Gouvernement, qui fixait au 1er octobre 2021 l’entrée en application de l’Avenant 43. Cet Avenant 43 attribue une aide financière au secteur de l’aide à domicile régi par les associations, telles que l’ADMR, afin de financer une revalorisation de salaire de 15 % en moyenne pour les personnels de l’aide à domicile. Le Département du Lot prend la liberté d’élargir l’attribution de cette enveloppe au titre de l’Avenant 43, au secteur lucratif, c’est-à-dire aux structures commerciales dont LAD.
L’ADMR attend de l’argent du Département du Lot
« Que le Département du Lot veuille mettre sur un pied d’égalité les personnels intervenant au sein de LAD avec ceux qui travaillent dans le secteur associatif, pourquoi pas, mais pas en se servant sur les fonds prévus par l’État pour le secteur associatif ! » indique Michel Gaston. La direction de l’ADMR du Lot alerte les services du Département sur ce « détournement d’affectation » des fonds et obtient en réponse, grosso modo un tiers du financement attendu. « Le compte n’y est pas, ce qui nous met en difficulté pour honorer les engagements pris pour nos salariés ! » souligne M. Gaston.
L’USB (Union Syndicale de la Branche) associative à domicile, a travaillé durant près de 4 ans avec Mme Brigitte Bourguignon, ministre de la Santé et de la Prévention à la rédaction de l’Avenant 43*. Cet Avenant est destiné à améliorer les conditions salariales et d’évolution dans la carrière des salariés des associations d’aide à domicile ; structures pour lesquelles le Département fixe le tarif des prestations. « Nous attendons tout simplement, que les sommes qui sont versées par l’État pour des associations d’aide à domicile ne soient pas orientées au profit d’autres types de sociétés ; nous demandons que nous soit versée la part qui nous revient ! » martèle M. Gaston. Le Département du Lot, peut-il interpréter discrétionnairement l’application d’un Décret du gouvernement (parution au Journal Officiel en juillet 2021), sans susciter la moindre réaction ni de la part des élus ni de la part de l’administration ?
Quant au financement de cet Avenant 43, il était prévu qu’en 2021, il soit abondé à 70 % par l’État et à 30 % par le Conseil départemental ; pour 2022, 50 % par l’État et 50 % par le Département. Question posée par les représentants de l’ADMR : qu’est devenu le million d’euros dont le Département a fait état dans sa communication, au titre du versement pour 2022, dans le cadre de cet Avenant 43 ? Simple erreur d’aiguillage ? L’ADMR du Lot attend désespérément que les sommes versées par l’État lui parviennent à hauteur de ce qui est prévu par le Décret…
Le dossier est porté au niveau du Ministre
Au demeurant l’ADMR n’est pas la seule structure associative en difficulté sur ce sujet, il y a également d’autres associations d’aide à domicile, qui interviennent sur le territoire départemental et qui subissent le même sort. Paradoxe de la situation, lorsque des représentants salariés de Lot Aide à Domicile ont appris que les salariés des associations allaient percevoir ce que prévoyait l’Avenant 43, il y a eu manifestation devant le Département pour demander « la même chose que ce qui était octroyé au secteur associatif ». Les salariés de LAD ont obtenu gain de cause alors que l’ADMR attend toujours l’enveloppe prévue pour rémunérer ses employés. Pour l’heure, l’ADMR du Lot est en attente de réponses du courrier adressé au Ministère des Solidarités, à la CNSA, au préfet du Lot, aux députés du Lot… Michel Gaston s’interroge sur le positionnement du Département du Lot à l’égard de l’ADMR, alors que dans l’ensemble des autres départements, à commencer par le Tarn-et-Garonne, les associations d’aide à domicile « perçoivent normalement ce qui est prévu par l’État et tout se passe très bien » insiste-t-il.
Le Département du Lot serait-il le seul en France à se retrouver dans une telle illégalité, si la dénonciation de l’ADMR est avérée ? Pour quel motif ? « Une nouvelle tentative pour étouffer les associations d’aide à domicile ? » s’interroge encore Michel Gaston. Le Lot a créé lui-même une situation unique en France en ayant mis en place une société d’économie mixte avec LAD pour gérer l’aide à domicile.
Une situation « inquiétante » pour les associations
« Nous appelons à une régularisation de la situation le plus rapidement possible, car plusieurs associations de l’ADMR éprouvent déjà des difficultés financières, en raison du poids que représente l’injustice générée par le Département ! » évoque Maxence Ardan, le directeur départemental de l’ADMR. Plus généralement président et directeur dénoncent une « situation inquiétante » selon laquelle l’ADMR se doit de passer sous les fourches caudines du Département pour quémander ce que l’État a prévu pour les associations d’aide à domicile.
Question : comment le Département du Lot garantit-il sa neutralité que lui impose son rôle de redistributeur de fonds de l’État, en gérant une société d’économie mixte (LAD), laquelle se retrouve en concurrence directe avec les associations d’aide à domicile ?
* Michel Gaston est le signataire de cet Avenant 43, déposé à la Direction générale de la cohésion sociale
L’Avenant 43
« À travers cet Avenant 43, notre objectif a été d’obtenir la reconnaissance des salariés, ce qui passe bien sûr par l’amélioration des salaires, la prise en compte des formations professionnelles, la qualité des interventions chez les bénéficiaires, l’évolution de carrière… Cette démarche fait suite à la période du confinement où il s’agissait de reconnaître nos personnels quelque peu oubliés, alors que tous les projecteurs étaient braqués sur les soignants » souligne Michel Gaston, président de l’ADMR du Lot.
La position du Département du Lot
Contactés par nos soins, le président du Département du Lot et ses services qualifient de « diffamatoires » les allégations des représentants de l’ADMR du Lot. « Nos versements de fonds à l’ADMR correspondent aux engagements financiers de l’État et nous ne sommes redevables en rien, auprès de l’ADMR » nous est-il assuré, en substance. Le dossier étant à présent porté au niveau du Gouvernement, la question ne devrait pas tarder à être tranchée.
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