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Après Brasilia, Lula doit remettre l’Etat au pas

Une poussée de violence au cœur de la démocratie brésilienne. Dimanche, la capitale Brasilia a été le théâtre de scènes de chaos de grande ampleur. Des milliers de partisans de l’ex-président Jair Bolsonaro, vêtus des couleurs jaune et bleu du Brésil, ont pris d’assaut le palais présidentiel, la Cour suprême et le Congrès sur la place des Trois pouvoirs, où se situent les trois institutions.

Une semaine après l’investiture de Lula, un président dont ils contestent l’élection, les manifestants ont souillé ces trois lieux de pouvoir dans un triste remake de l’attaque du Capitole en janvier 2021 par des militants trumpistes. L’icône de la gauche brésilienne a estimé dimanche que son prédécesseur Jair Bolsonaro avait « encouragé » les « vandales fascistes » à mener cette action. Plus de 200 personnes ont été arrêtées.

Maud Chirio, maîtresse de conférences à l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée et spécialiste de l’histoire de la dictature militaire brésilienne, revient pour 20 Minutes sur ces évènements et leurs conséquences.

Où en est-on ?

Au lendemain de cette invasion « sans précédent dans l’histoire du Brésil », Lula s’est réuni avec les présidents du Sénat, de la Chambre des députés et de la Cour suprême au Palais présidentiel du Planalto. L’entrevue s’est conclue par un communiqué conjoint appelant à « la défense de la démocratie ».

La communauté internationale a massivement condamné l’attaque de ces symboles de la vie politique brésilienne. Les dirigeants américains, canadiens et mexicains ont condamné les attaques et assuré Lula de leur soutien, dans un communiqué commun lundi.

Chine, Russie, Canada, Union Européenne… Le Pape argentin François a aussi dénoncé les violences, tandis qu’Emmanuel Macron estime dans un tweet « que la volonté du peuple brésilien et les institutions démocratiques doivent être respectées ».

« La condamnation des dirigeants internationaux, c’est fondamental. L’enjeu est global, ça pose la question de la survie de la démocratie brésilienne. Plus les médias internationaux couvriront et les dirigeants appuieront leur soutien, plus il sera facile pour Lula de reprendre la situation en main », estime Maud la spécialiste Maud Chirio.

Comment Lula va pouvoir gouverner ?

Une semaine à peine après son investiture, snobé par son prédécesseur Jair Bolsonaro, le chef d’Etat fait face à une crise politique majeure, avec une interrogation, tenace : comment gouverner ?

« Prendre d’assaut de telles institutions, ce n’est pas simple normalement. Des questions de sécurité se posent. Lula est confronté à une bolsonarisation de l’appareil d’Etat qui peut l’empêcher de gouverner », analyse la chercheuse.

L’attitude de certains membres des forces de l’ordre, complaisants envers les manifestants, interroge. « Les forces armées au sens très large qui sont également divisées et sont dans un conflit loyauté à l’égard de légitimation du pouvoir central. Ça signe aussi que la transition entre un gouvernement fascisant et un gouvernement démocratique n’est pas une simple alternance. La question se pose au Brésil, et à toutes les démocraties qui passent par une expérience fascisante », précise Maud Chirio.

Lula a déjà commencé le coup de balai. Le chef de la police de Brasilia, Anderson Torres, un bolsonariste ancien ministre de la Justice, a été démis de ses fonctions. Dès dimanche soir, le juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes a suspendu pour 90 jours de ses fonctions le gouverneur du district de Brasilia, Ibaneis Rocha, qui avait nommé Torres.

Et si Lula a gagné l’élection présidentielle, il doit composer avec un Congrès où les soutiens de l’ex-président sont nombreux et les Etats fédérés majoritairement acquis à Bolsonaro.

Quelle responsabilité et quel avenir pour Jair Bolsonaro ?

Par son discours, « Bolsonaro a créé le climat propice (à l’attaque), il a eu un rôle émetteur dans la haine de Lula et les institutions », constate Christophe Ventura, directement de recherche à l’Iris, interrogé par Le Parisien.

« Durant tout son mandat, Bolsonaro et ses fils n’ont cessé d’anticiper la contestation de la défaite », rappelle Maud Chirio. Pour la chercheuse, l’attaque n’était pas un coup d’Etat mais l’accomplissement d’une stratégie de désordre généralisé, alors que certains partisans de Bolsonaro ont manifesté devant des casernes militaires depuis la défaite du président sortant d’extrême droite le 30 octobre.

Dans une série de tweets, et seulement six heures après les assauts, Bolsonaro a condamné du bout des lèvres « les déprédations et invasions de bâtiments publics », mais a nié toute responsabilité, « rejetant les accusations, sans preuve » de Lula selon qui il aurait encouragé les violences des « fascistes ».

L’ex-président n’a pas assisté à l’investiture de son successeur le 1er janvier, et a préféré filer en Floride pour au moins un mois, sur les terres de Donald Trump, qui a qualifié le Brésilien de « type formidable » en septembre, appelant à sa réélection.

Comme le milliardaire américain, il a été élu sur des idées extrêmes. Comme Trump, la perte de la présidence lui fait craindre des poursuites judiciaires. Et comme l’Américain, il a refusé de condamner l’assaut du Capitole. A l’époque, il avait pointé le « manque de confiance des électeurs », qui a « conduit à ce qu’il se passe », comme le rappelle Le Monde. Presque deux ans jour pour jour avant le chaos brésilien.

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