
C’est une découverte de taille que Séverine Cornil a faite en allant nettoyer ses rangs de fraisiers, dans sa ferme à Plouguiel : deux morilles noires, de l’espèce morchella elata, semble-t-il.
Une surprise de taille, car même si elles ne sont que deux, l’une des morilles avoisine les 100 g ! Et surtout, ce champignon, de prestige et très convoité, n’est pas un habitué de la Bretagne, la morille préférant les sols calcaires aux sols acides.
Dans un champ de fraises bio
Cette découverte, partagée avec son compagnon Cédric Daniel, les intrigue. Car s’ils sont amateurs de champignons, ils n’en sont pas experts. En effet, installés depuis une dizaine d’année à la ferme de Kerautret, ils y ont développé une activité de maraichage bio de légumes et petits fruits, dont des fraises, qu’ils cultivent sur 1 hectare de plein champ et 2 000 m2 de serres. Des produits frais, qu’ils vendent le jeudi sur le marché de la Roche Jaune et le mardi à la ferme où ils font aussi dépôt des paniers du bocage.
L’apparition de ces morilles au milieu de leurs fraises pique donc leur curiosité, et fait grimper leur adrénaline. Ils contactent alors, un ami, Vivien Gabillaud, myciculteur de pleurotes à la ferme de Kebell Touseg à Plougrescant, qui vient aussitôt admirer les spécimens.

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Un mycologue réputé attendu
Les hypothèses vont bon train quant aux raisons de cette fructification, mais aussi et surtout quant à sa nature. S’agit-il d’une fructification spontanée, la morille s’étant développée comme un organisme saprophyte, s’alimentant des matières en décomposition présentes, ou bien d’une fructification pérenne, la morille s’étant développée comme un organisme symbiotique, son mycélium s’étant associé à l’appareil racinaire d’un végétal vivant à proximité ?
Afin de tirer tout ça au clair, Vivien a contacté un mycologue réputé des Deux-Sèvres, Michel Hairaud, qui de passage à Penvénan, viendra sur place étudier le phénomène, et prélever un échantillon, pour en faire une analyse. Secrétaire de la Fédération des associations mycologiques de l’Ouest (FAMO), ce spécialiste des champignons intervient comme conférencier sur diverses thématiques relatives au règne fongique.

Un projet de culture d’une espèce locale
Ce monde ni végétal, ni animal, reste encore plein de mystères, au-delà des découvertes déjà réalisées. C’est ainsi que, depuis plusieurs années, des champignons sont utilisés comme des dépolluants naturels des sols contaminés.
D’autres études ont mis en évidence le rôle que jouent les champignons carbonicoles (qui poussent dans des zones qui ont brulé) dans la résilience des milieux qu’ils investissent, tandis qu’une récente étude scientifique menée par un britannique a démontré, que les champignons échangeraient entre eux au travers de signaux électriques : une forme de « langage » spécifique composé d’une cinquantaine de séquence symboliques identifiées.
Pour Vivien Gabillaud, qui avait prévu de se lancer dans la culture des morilles, cette découverte pourrait accélérer la démarche, avec, pourquoi pas, la culture d’une espèce locale.
Marianne Le Soudeer