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Biodiversité : Il raconte la vie secrète de nos amies les chauves-souris en forêt de Rambouillet

Laurent Tillon, responsable biodiversité à l'ONF sort un livre Les fantômes de la nuit.
Laurent Tillon, responsable biodiversité à l’ONF sort un livre Les fantômes de la nuit. (©78actu. Philippe Cohen)

Domicilié près de Montfort-L’ Amaury (Yvelines), au cœur de la forêt de Rambouillet, Laurent Tillon est spécialiste de la biodiversité à l’ONF (Office national des forêts) et un expert des chiroptères, autrement dit des chauves-souris.

En dédicace à Rambouillet ce jeudi 16 février 2023

L’auteur du best-seller Être un chêne (Acte sud) consacre à l’animal son dernier ouvrage, intitulé Les fantômes de la nuit (Acte sud), paru ce mois-ci. Il est attendu ce jeudi 16 février 2023, à 18 h, à la salle Patenôtre, à Rambouillet, pour sa seule et unique séance de dédicaces dans les Yvelines.

Depuis son entrée à l’ONF de Rambouillet (Yvelines) en 1998, Laurent Tillon n’ a eu de cesse de tenter de percer le mystère des chauves-souris. Capables de vivre 40 ans, de chasser en meute ou encore d’élever son unique rejeton en colonie, ces animaux possèdent des capacités insoupçonnées…

Actu : Comment est née votre fascination pour les chauves-souris ?

Laurent Tillon : Elles font partie des animaux de la nuit qui font peur. On me disait enfant : ce sont les animaux du diable, qui s’accrochent aux cheveux et sucent le sang, alors que tout cela est totalement faux. Adolescent, j’ai découvert dans une falaise calcaire, en Eure-et-Loir, mes premières chauves-souris. Ces animaux mystérieux, de la nuit devenaient d’un seul coup accessibles.

Laurent a dû se former pour grimper jusqu'à 30m dans les arbres et explorer les cavités.
Laurent Tillon a dû se former pour grimper jusqu’à 30m dans les arbres et explorer les cavités habitées par les colonies de chauves-souris. (©DR)
« J’ai recyclé l’endoscope d’un médecin pour les étudier dans les arbres »

Vous avez été un précurseur dans les années 1990 de l’étude des chauves-souris. Il fallait tout inventer ?

L. T. : Il fallait « débroussailler », inventer des techniques, le matériel… Elles étaient dans les arbres, il fallait donc que je grimpe pour aller voir ! Parfois à plus de 30 m de haut. Sauf qu’il fallait être grimpeur naturaliste. Je me suis formé. Pour atteindre des endroits inaccessibles, j’ai tout recyclé : le miroir de mon dentiste puis un endoscope du médecin de l’hôpital de Rambouillet. Ces instruments m’ont permis de voir et d’enregistrer les images à l’intérieur des arbres.

Laurent pose des filets autour des étangs pour préparer les captures de chauves-souris.
Laurent Tillon pose des filets autour des étangs pour préparer les captures de chauves-souris. (©DR)

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Des nurseries, un radar pour se déplacer

Quelles ont été vos plus grandes découvertes sur les chauves-souris forestières ?

L. T. : Ma première découverte a été de comprendre la manière dont ces animaux vivent dans nos forêts, en colonie, dans les arbres. Quand on va en forêt, on n’imagine pas qu’il y a des chauves-souris. J’ai compris qu’elles élèvent ensemble dans des nurseries un seul rejeton.

Le plus fascinant est le radar dont dispose la chauve-souris pour se déplacer…

L. T. : C’est le système d’écholocation. Car pour se repérer la nuit, elles émettent des cris réguliers. Les échos disent clairement si c’est une feuille, une chenille, un autre insecte, avec une précision parfaite.

Un oreillard roux photographié en forêt de Rambouillet par Laurent Tillon.
Un oreillard roux photographié en forêt de Rambouillet par Laurent Tillon. (©Laurent Tillon)
« Quand les chauves-souris vont bien, nous allons bien »

Vous expliquez que ce pouvoir d’écholocation dépasse la simple fonction de déplacement…

L. T. : Elles racontent ce qu’elles font en permanence et les vivants peuvent réagir autour d’elles. Cela nous plonge dans des réflexions extraordinaires sur le rôle de ces animaux. C’est une écriture du monde de la nuit vu par les chauves-souris. Elles sont nos fantômes de la nuit comme nous sommes leurs fantômes du jour depuis la Préhistoire.

Notre destin et celui des chauves-souris seraient liés sur les enjeux climatiques dites-vous. De quelle manière ?

L. T. : Elles sont très proches de nous. Ce sont des mammifères, les seuls volants. Quand les chauves-souris vont bien, nous allons bien. Quand on déverse des insecticides qui tuent les insectes, cela à un impact sur les chauves-souris et notre santé.

Comment l’ONF a sauvé les chauves-souris

Le travail de Laurent Tillon a conduit à la mise en place de dispositifs de protections d’espèces de chauves-souris menacées : « Notre premier bilan dans les années 90 montrait des espèces dans un état catastrophique, comme les rhinolophes, et beaucoup de murins. On a mis en place un premier plan d’action nationale pour leur conservation sur toutes ces espèces.»
« Des mesures pour protéger les grottes pour qu’elles ne soient pas dérangées en hiver car cela leur est fatal, poursuit l’expert. On est allé voir des gens qui avaient des gîtes pour le grand murin. On a réussi à convaincre les gens qui au départ voulait s’en débarrasser. »
L’ONF a également pris des mesures de conservation des cavités, des îlots de vieillissement des arbres et veille à l’augmentation des réserves, comme en forêt de Rambouillet.

 

Laurent capture et étudie ces mammifères volants de quelques grammes.
Laurent Tillon capture et étudie ces mammifères volants de quelques grammes. (©DR)

 

« On a appris à vivre ensemble. Le livre est une invitation à cohabiter »

Vous expliquer que, parfois, la course aux énergies renouvelables est en contradiction avec le développement des chauves-souris. Vous citez les éoliennes notamment. Pouvez-vous nous expliquer ?

L. T. : Quand la population des noctules décroît du fait des éoliennes, nous avons des conséquences directes sur nos forêts publiques, soit un quart des forêts françaises. La population des hannetons augmente alors. Nous avons des problèmes liés aux hannetons sur 80 000 ha de forêt domaniale aujourd’hui, contre une dizaine d’hectares il y a quelques années. Le noctule est le seul prédateur du hanneton !

Avoir des chauves-souris chez soi est un avantage ?

L. T. : Vous savez, je récupère les déjections des chauves-souris qui vivent derrière les volets de ma maison, près de Rambouillet. C’est très efficace pour fertiliser mon potager. Et les soirs d’été, nous ne sommes jamais embêtés par les moustiques. Les chauves-souris les mangent. On a appris à vivre ensemble. Le livre est une invitation à cohabiter.

Fantômes de la nuit, chez Actes Sud. Prix : 22 €.

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