
Vendredi 10 février, un grave accident de voiture, impliquant trois véhicules, dont celui de Pierre Palmade, est survenu en Seine-et-Marne. Testé positif à la cocaïne, l’humoriste faisait la fête depuis plus de 24 heures dans sa maison de Dammarie-les-Lys, avec quatre jeunes gens. Il aurait consommé diverses drogues de type « chemsex« .
On parle bel et bien de drogues, mais il s’agit avant tout d’une pratique. Peu évoquée, les conséquences qu’elle engendre ne sont pourtant pas négligeables. Qu’est-ce que le Chemsex ? D’où vient cette pratique ? Quels sont les effets recherchés ? Actu.fr fait le point.
Qu’est-ce que le chemsex ?
« Plans chems », « plans slam », « plans planants », « slam party », autant de termes pour désigner cette pratique apparue dans le milieu gay anglo-saxon il y a une vingtaine d’années. Le chemsex, contraction des mots anglais « chemical » (chimique) et « sex » (sexe), désigne le fait de consommer des produits psychotropes à plusieurs pendant les activités sexuelles pour les rendre plus intenses et les prolonger.
Cette pratique peut exposer les participants à des risques accrus d’infection sexuellement transmissible, d’addiction aux substances et d’apparition de troubles psychiatriques au long cours.
Généralement accolée aux homosexuels, stigmatisant davantage la communauté LGBTQIA+, l’enquête de Sea, Sex & Chems révèle que sur 1 100 personnes pratiquant le chemsex, 16,5 % des chemsexeurs sont des femmes et 5,4 % des hommes hétérosexuels.
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Comment cette pratique a-t-elle évoluée ?
Le sujet est encore tabou. Pourtant, ce phénomène arrivé en France en 2010 s’est récemment développé avec les réseaux sociaux et les applications de rencontre. « Le chemsex a pris son essor à partir du moment où internet s’est développé et que les nouvelles drogues de synthèse sont arrivées sur le marché. Elles coûtent moins cher et sont faciles à trouver sur le net », souligne Yann Botrel, hypnothérapeute spécialiste des addictions à Lyon, à actu.fr.
Avec les sites de rencontres géolocalisés, c’est devenu très simple de trouver une soirée chem autour de soi.
Le chemsex apparaît même dans des séries. Sur Netflix, la dernière saison d’Élite, très regardée des jeunes, met en scène une soirée chemsex, dédramatisant totalement cette pratique.
Quelles sont les drogues utilisées dans le chemsex ?
Le chemsex se définit par l’usage de drogues dites de synthèse NPS (Nouveaux Produits de Synthèse). Les produits utilisés sont surtout les cathinones, parfois associées avec d’autres substances. Elles peuvent être consommées par voie orale, nasales ou injectées.
Celles qui sont les plus souvent utilisées sont :
- Les cathinones (4-MEC, 3-MMC, 4P, MDPV…) ;
- Le poppers ;
- Le GHB/GBL ;
- La métamphétamine ;
- La kétamine ;
- La cocaïne ;
- La MDMA.
Quels sont les effets recherchés ?
Selon Drogues info service, les « chemsexeurs » cherchent à augmenter le désir, le plaisir, les sensations et espèrent se sentir plus performants sexuellement avec l’usage de drogues. « C’est le propre de l’addiction. Au début, il y a cet effet ‘wahou’ car les sensations sont décuplées. Puis, on passe de la ‘conso envie’ à la ‘conso besoin’ », souligne Yann Botrel.
Chaque produit a sa propriété : stimulant, euphorisant, exaltant, relaxant… Mais l’ensemble de ces drogues favorisent la désinhibition, augmentent la confiance en soi et boostent l’endurance sexuelle. « Beaucoup de gens ont un manque de confiance et d’estime d’eux-mêmes. C’est vraiment propre à chacun : à l’individu, à l’environnement et au produit en lui-même », précise Yann Botrel. « Ça exprime un mal-être. »
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Quelles conséquences ?
Pendant plusieurs heures, voire plusieurs jours, les consommations de drogues s’enchaînent et les rapports sexuels se répètent, engendrant des risques importants pour la santé mentale et physique.
Ces cocktails de drogues conduisent à des dépendances, à l’envie de ressentir des sensations toujours plus fortes. Mais ils peuvent surtout provoquer des overdoses, des intoxications et des comas et dans le pire des cas, la mort.
Selon une étude menée par le centre d’addictovigilance de Paris et de Montpellier, le chemsex aurait entraîné 24 décès sur les 235 identifiés entre janvier 2008 et août 2017. « Il n’y a aucune étude pour le moment donc on n’a pas réellement de chiffres. C’est encore très flou », confie Yann Botrel.
Il y a 500 overdoses par an en France, donc on peut se poser la question de savoir si ce n’est pas lié au chemsex.
Désinhibés, les adeptes du chemsex ne prennent aucune précaution pour se protéger des maladies sexuellement transmissibles (IST). Au-delà des risques d’abcès et de plaies, les « chemsexeurs » se risquent à la transmission du VIH, de l’hépatite B et C ou de la syphilis.
Rupture sentimentale, perte d’amis, de travail… Les effets sur le long terme sont tout aussi dévastateurs. En « descente », les adeptes se retrouvent isolés et en situation de mal-être. « On voit des gens qui se désociabilisent radicalement. Le produit prend de plus en plus de place, donc ça créé des problèmes d’humeur et d’isolation » souligne le spécialiste des addictions.
Lors de ces pratiques, la notion de consentement est très problématique, car elle ne peut toujours être établie. « De plus en plus de jeunes filles se retrouvent embarquées là-dedans, sans savoir réellement de quoi il s’agit. Il y a des gros risques d’agressions sexuelles ou de viol parce que sous stupéfiants, le jugement est altéré et on peut faire n’importe quoi », détaille Yann Botrel.
« S’il y a une enquête au niveau national, on va tomber de notre chaise », conclut le spécialiste.