La maire de Macau a accepté de nous parler de cet homme pour lui rendre hommage. « Jean-Claude était un personnage du village, un personnage atypique, résolument seul. C’était un choix qu’il avait fait », raconte Chrystel Colmont-Digneau. Depuis plus de trente ans, il vivait en ermite dans sa cabane. Il l’avait lui-même construite dans un endroit aux noms enchanteurs : chemin du Bord de l’Eau, lieu-dit Le Bout de l’île. Il s’occupait de la porte à flots de La Maqueline, qui permet de gérer les fluctuations des niveaux d’eau dans les marais, et cela faisait sa fierté.
Il menait une existence « en harmonie avec la nature », au milieu d’arbres fruitiers qu’il avait plantés, de son potager qu’il cultivait, d’oiseaux, des poules, des pigeons, de son chien qui est mort avec lui… Sans eau, sans électricité. Il s’éclairait à la bougie, avait installé un poêle pour se chauffer, récupérait de l’eau dans l’estuaire et la laissait reposer pour se laver. Il pêchait, chassait. Il y a quelques années, quand il pouvait encore enfourcher son vélo et avait envie de voir un peu de monde, il se rendait parfois au centre du village. Boire le café, faire quelques courses, discuter, pas trop.
Sa cabane, « son coin de paradis »
Malgré la rudesse de ses conditions de vie, Jean-Claude Miqueau a toujours refusé de quitter sa cabane. « On a tout tenté, on lui a même proposé d’être relogé au moins pendant les hivers. Mais il ne voulait pas partir de ce qu’il considérait comme son coin de paradis. Pour lui, cela serait revenu à être mis en cage. Pour nous, c’était un dilemme, mais on a toujours respecté sa volonté », témoigne la maire. L’âge avançant et sa santé déclinant, Jean-Claude n’avait cédé que sur un point : il avait fini par accepter de se faire livrer des repas par le service de portage de la communauté de communes.

Marine Jay
« C’était un homme adorable, authentique. Il touchait une retraite, il avait été salarié mais je ne sais pas de qui, poursuit Chrystel Colmont-Digneau. Il m’inspirait beaucoup de respect et de tendresse. Il n’était pas facile à apprivoiser, mais lorsque vous réussissiez à tisser un lien, il avait un regard très doux. Il choisissait les gens qu’il voulait voir ou pas. Il y a quelque temps, on a accueilli un écrivain qui préparait un livre sur le 45e parallèle nord, qui traverse la commune. Il cherchait à rencontrer des personnages du village. On a pensé à Jean-Claude, mais Jean-Claude ne s’est jamais montré. À chaque fois que l’écrivain s’est présenté devant sa cabane, il s’est caché. »
Certains, dans le village, ne l’ont d’ailleurs jamais connu et pensaient qu’il était « une légende ». Un enfant des marais qui s’en est allé dans des circonstances tragiques.