Interminable série noire. Propriétaire de quatre appartements dans la résidence Cannes Marina, Marie-Madeleine et André Goyat se sont bâtis, au fil de la vie, un joli patrimoine. Des biens qui sont, pourtant, à l’origine des maux de ce couple d’octogénaires. « Les histoires se multiplient », soupirent-ils, assis devant une pile de dossiers.
Depuis des années, ils accumulent les problèmes avec leurs locataires. Si bien qu’actuellement, deux d’entre eux occupent toujours les lieux, alors même que leurs baux sont expirés. Évidemment, sans s’acquitter du loyer.
Premier cas de figure, le plus récent: « Nous avons un appartement au 3e étage du bâtiment Le Jean Bart, le même que nous [ils vivent en rez-de-chaussée] et la locataire, qui vit avec sa maman en fauteuil, est arrivée en décembre 2020″, introduisent-ils. Un bail à l’année, renouvelé une première fois, « sans aucun problème ».
« Nos rapports étaient cordiaux… »
Arrive, alors, le mois de novembre 2022. « Elles nous ont donné congé le 10 [lettre en accusé réception à l’appui] car elles comptaient sur un autre logement, qu’elles n’ont finalement pas eu. » Le contrat arrivé à terme et, malgré leur souhait de vendre l’appartement, les Goyat proposent un bail saisonnier, du 1er au 31 janvier, « pour rendre service. Après un mois, il était convenu que l’on se retrouve, le 31 janvier, pour renouveler. À partir du 25, elles ne répondent plus au téléphone, assure André. Donc, le 30, j’envoie un SMS pour rappeler qu’on se retrouvait le lendemain à 10h, pour signer. À 9h45, elles sont venues chez nous. »
Là, le ton est donné. « La mère a dit: sur les conseils de notre avocat, on ne signe pas et on ne quitte pas les lieux. Sur ce, elles sont parties. » Sonnés – « jusque-là, nos rapports étaient cordiaux; on n’a rien compris » – les octogénaires encaissent le choc. Puis, vers midi, André grimpe au 3e: « Les gendarmes étaient là, je n’ai pas pu entrer. Les locataires leur auraient dit qu’elles refusaient de partir car on leur devait un mois de préavis. Mais ce sont elles qui nous ont donné congé et, en plus, c’est un bail saisonnier [donc sans préavis]… »
Disparu avec 9.000€ d’impayés
Les époux appellent leur avocat, puis un huissier. Ce dernier se rend sur place en soirée, toujours le 31, et « dresse un constat avec sommation de quitter les lieux. Elles maintiennent qu’elles restent pendant la trêve hivernale [jusqu’au 31 mars]. Mais nous n’étions pas prêts à renouveler le bail jusque-là [90 jours maximum en location saisonnière]. »
En attendant que la procédure suive son cours, ils doivent composer avec un autre problème. Similaire et antérieur. « Cet appartement où l’on vit, on aimerait le vendre, pour s’installer dans celui qui est dans le bâtiment Le France. » Le souci, c’est que, lui aussi, acheté en janvier 2016, est « squatté » par leur ex-locataire. « Elle est installée depuis mai 2020 et ne paie plus depuis décembre 2021, le bail s’étant achevé en mai 2022 », résume Marie-Madeleine.
Malgré une tentative de conciliation, en mars 2022, rien ne bouge. Selon les Goyat, la locataire justifie « le non-paiement pour cause d’insalubrité ». Chose qu’ils réfutent. Une situation qui s’éternise, dont ils espèrent néanmoins le dénouement, avec un jugement attendu aujourd’hui même, ce mardi 14 février. D’autant que ce peu enviable « doublé » n’est pas une première. Leur quatrième bien à Cannes Marina, un studio situé dans le bâtiment Le Galion et acheté en 2000, a, lui aussi, connu un occupant indésirable. « Depuis 2015, nous avions un locataire ukrainien, qui était agent de sécurité dans la résidence. Tout se passait bien, mais, quand la société a perdu le contrat, il s’est retrouvé au chômage. »
Et arrête de verser le loyer. Après de longs mois et un jugement en juin 2020, il a fini par quitter les lieux « et le pays, sans laisser d’adresse », avec une facture impayée de 9.000 euros.
« Dès que c’est réglé, on vend tout! »
Jamais trois sans quatre: les Goyat ont eu maille à partir avec l’occupante de leur appartement rue Janvier-Passero, toujours à Mandelieu. « Elle a refusé de payer pendant deux ou trois mois, dès février 2019. Et a finalement été condamnée par le tribunal d’instance de Cannes à nous verser 2.040 e. » Le jugement rendu, les époux ont rapidement revendu le bien, acheté en 2017.
C’est, d’ailleurs, leur état d’esprit aujourd’hui: « On en a marre. Dès que c’est réglé, on vend tout. Heureusement, nous n’avons plus de crédits sur ces biens, mais on perd quand même de l’argent tous les mois… »
Au-delà des considérations pécuniaires, ils sont, surtout, fatigués de cet incessant manège. « Je n’en dors plus, de ces histoires, grimace André. J’ai déjà des problèmes de santé et, à notre âge [il a 85 ans; elle, 81], on aimerait faire autre chose de notre temps. On avait acheté un camping-car après le Covid: on l’a revendu, car on ne peut jamais partir. » Ils concluent, appelant de leurs vœux: « On espère que la nouvelle loi anti-squat (1) va améliorer les choses pour les propriétaires. Parce que ce n’est vraiment plus possible… »
1. Adoptée en première lecture par l’Assemblée Nationale le 2 décembre dernier, puis par le Sénat, le 3 février.