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Le Mans. Il y a 150 ans naissait l’Obéissante, voiture mythique de la famille Bollée

L'Obéissante, ici en 1873, avec au volant Amédée Bollée, à sa droite son frère Ernest, à sa gauche son père Ernest-Sylvain.
L’Obéissante, ici en 1873, avec au volant Amédée Bollée père, à sa droite son frère Ernest, à sa gauche son père Ernest-Sylvain. ©DR

C’est une invention qui a marqué l’histoire de l’automobile. Créée par Amédée Bollée père, l’Obéissante fête en 2023 ses 150 ans d’existence.

Michel Bollée, qui a consacré un ouvrage (Au temps des pionniers de l’automobile : Les Bollée dans la course, 1895-1900) à sa famille pionnière de l’automobile, revient sur l’histoire de cette voiture créée par son arrière-arrière-arrière grand-père.

Dans quel contexte Amédée Bollée père a-t-il créé l’Obéissante ?

Ça a commencé lors de l’exposition universelle de 1867 à Paris. Amédée Bollée travaillait avec son père Ernest-Sylvain Bollée à la fonderie de cloches : il y avait un pavillon dans lequel se présentait un carillon de 43 cloches. Amédée a découvert de visu ce qu’on appelle à l’époque les routières à vapeur. Elles avaient l’inconvénient d’être très lourdes, lentes et souvent avec une chaudière horizontale. Accaparé par ses obligations à la fonderie, il n’est pas revenu dessus mais il avait l’idée de travailler à des plans sur des machines à vapeur. En 1868, il est parti aux Etats-Unis pour installer un carillon à Buffalo.

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La guerre de 1870 est arrivée. La fonderie de cloches au Mans a été réquisitionnée. Il est allé à Nantes et a eu l’occasion de retourner voir le fabricant de routières. Après les avoir examinées, il se dit : « pourquoi personne n’a construit de machines plus légères, plus rapides capables de transporter elles-mêmes leurs voyageurs ? » A partir de 1872, il a commencé à dresser les plans de cette automobile. En 1873, elle était prête à rouler. 

En quoi ce véhicule était-il révolutionnaire à l’époque et a-t-il inspiré des modèles ultérieurs ?

Cette première voiture à vapeur a été très novatrice par sa technique, son encombrement, son poids. Ça peut paraître très lourd 4,2 tonnes mais à l’époque, les autres routières pesaient 7-8-9 tonnes et ça roulait à la vitesse d’un piéton. La grande innovation, outre le fait d’être un véhicule capable d’emmener lui-même ses voyageurs est qu’il avait un système de direction qui lui permettait une maniabilité assez surprenante. Elle avait une vitesse de 40-45 km/h ce qui paraît anodin à notre époque mais en 1873, c’était une vitesse absolument considérable.

L'Obéissante le 23 septembre 1923 lors de son cinquantenaire sur le circuit de la Sarthe lors du meeting d'automne de l'A.C.O. Au volant Amédée Bollée fils et à sa droite son frère Camille.
L’Obéissante le 23 septembre 1923 lors de son cinquantenaire sur le circuit de la Sarthe lors du meeting d’automne de l’A.C.O. Au volant Amédée Bollée fils et à sa droite son frère Camille. ©DR

C’est une voiture sur laquelle on retrouve les grands principes des véhicules modernes qui ont été développés sur d’autres véhicules et pas que par les Bollée. En termes d’innovation, on a aussi les voitures de course d’Amédée Bollée fils, notamment son torpilleur de 1899 qui a participé au tour de France automobile. Là il y avait véritablement la 1e voiture de course à moteur arrière. Elle roulait à près de 100 km/h. 

Comment les premiers essais se sont-ils déroulés ?

Elle est sortie pour la 1e fois au printemps 1873. Au bout de 500 m, il n’y avait plus de pression. Amédée était accompagné d’Amédée fils, qui avait 6 ans. Amédée père dit le charbon ne vaut rien, il achète deux ou trois sacs de pommes de pins chez l’épicier. La voiture continue et un peu plus loin, le joint de vapeur a sauté. Et il n’avait pas de joint de rechange Que faire ? Son fils a rapporté plus tard qu’il a vu son père prendre son chapeau et découper au fond une rondelle grande comme la main pour refaire le joint. Ils ont parcouru deux km. Amédée n’était pas satisfait de la chaudière. Il l’a refaite. Elle a pu rouler uniquement en Sarthe car il n’avait pas d’autorisation pour rouler dans d’autres départements. 

Quel a été l’accueil du public ?

Les gens étaient ahuris de la voir. Tous les journaux, les comptes-rendus de l’époque, disaient « qu’est-ce que c’était que cet engin? » Elle s’arrêtait sur la place des villages, de nombreux habitants accouraient et Amédée donnait des explications, c’était un événement !

D’autant qu’Amédée Bollée n’avait pas le droit de circuler avec en-dehors de la Sarthe

Beaucoup de gens venaient voir la voiture évoluer en Sarthe. Amédée roulait quand son emploi du temps lui permettait de sortir de la fonderie de cloches où il était très occupé. Il a dû demander une autorisation en mai 1875 pour circuler dans toute la France. En dépit des rapports favorables de l’ingénieur des Mines de la Sarthe, cette autorisation lui a été refusée par la préfecture le 28 juillet 1875 au motif qu’il devait faire une demande dans chacun des départements à traverser. Il ne s’est pas découragé et en août 1875, il a transmis une nouvelle demande pour circuler.

Exposée au salon Rétromobile

En 1934, la famille Bollée en a fait don aux collections nationales. Depuis, elle est exposée au conservatoire national des arts et métiers à Paris. Dernièrement, elle a été exposée au salon Rétromobile.

Eugène Caillaux qui était ministre des Travaux Publics et député de la Sarthe est venu au Mans pour essayer l’Obéissante le 23 août. Trois jours plus tard, il a délivré l’autorisation à une condition : avant d’entrer dans chaque département, il devait faire connaître son arrivée trois jours à l’avance. Il pouvait circuler mais avec des contraintes lourdes. Ça ne l’a pas empêché de partir le 9 octobre 1875 en direction de Paris. Conformément à la demande, l’ingénieur en chef de chaque département était avisé de l’heure d’arrivée de la voiture. Il y avait un représentant des ponts et chaussées qui se livrait à un examen de l’Obéissante. Il a atteint Paris après 18 heures de voyage.

Son arrivée à Paris n’est pas passée inaperçue…

Là, ça a été le branle-bas de combat ! Elle a été arrêtée plusieurs reprises par les agents de police, avec des contraventions. Après une heure, Amédée a décidé de passer outre. Le lendemain, il a été convoqué à la préfecture de police, on lui montre des piles de 75 procès-verbaux le concernant lui et sa machine. Faute de pouvoir arrêter la machine, les agents avaient procédé à des contraventions au vol ! L’industriel sarthois a invité le préfet à effectuer une promenade dans la voiture. Il est monté dans l’Obéissante, les agents de police ont laissé passer la voiture. Les contraventions ont été annulées et la voiture n’a plus été inquiétée dans ses promenades parisiennes.

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Il y a eu des articles de presse avec le verbe haut qui disaient que l’on voyait passer une machine si merveilleuse dont on est bien plus maître que du cheval le mieux dressé. Un article du Figaro dit qu’il ne lui manque plus que de dire papa et maman tellement la voiture lui semblait bien dressée. Ce sont des voitures qui ne faisaient aucun bruit. Les gens avaient remarqué : au début, il y a eu des surprises mais le Figaro rappelle que la voiture se dirigeait avec une merveilleuse précisions et les chevaux paraissaient surpris mais aucun n’était effrayé. Ca a été un événement cette voiture à Paris. L’Obéissante est rentrée au Mans le 27 octobre. Amédée a reçu de nombreuses lettres mais n’a donné aucune suite commerciale à ces demandes : il était trop pris par l’activité de la fonderie de cloches et n’était pas organisé pour construire. Il se disait aussi qu’un tel véhicule n’était pas à mettre entre toutes les mains.

Au temps des pionniers de l’automobile : Les Bollée dans la course, 1895-1900; Michel Bollée, Editions du Borrego – Eric Jamet éditeur. 

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