
Depuis le 1er janvier 2023, à cause de l’inflation, le pain a été supprimé des repas portés par le Centre communal d’action sociale aux retraités et personnes en perte d’autonomie de Lisieux (Calvados).
La décision a été prise mi-décembre 2022 par le conseil d’administration du CCAS de la Ville, réuni comme tous les ans pour fixer les tarifs de l’année suivante. Ce conseil d’administration est composé de six élus du conseil municipal et six membres d’associations intervenant dans le domaine de l’action sociale.
« Un non-sens »
Dans une lettre envoyée dans la foulée aux bénéficiaires – ils sont environ 80 -, le CCAS explique que c’est pour « ne pas augmenter le coût du repas « retraité Lexovien » » et le « maintenir » à 6,15 €. Alertés par deux retraités, les membres de Lisieux à venir, association de citoyens, s’étranglent en lisant ce courrier :
« Je suis scandalisée ! Nous sommes d’anciens professionnels de la santé, nous avons travaillé à l’hôpital et j’ai fait beaucoup de gérontologie dans ma carrière. Nous sommes complètement ahuris par cette décision. C’est un non-sens. »
Elle pointe « la problématique au niveau nutritionnel », et ajoute : « Le pain reste très fort dans la représentation mentale des personnes âgées. » Alain Le Renard, président de l’association, déplore « un manque d’humanité » et un « conformisme comptable affligeant ».

Un produit moins consommé ?
Directeur du CCAS, Jean-Michel Le Conte rappelle que « les denrées alimentaires ont pris plus de 50 % sur l’année 2022 ».
« Si nous avions impacté ces hausses sur le prix des repas, il aurait fallu les augmenter de 15 % et les faire passer à 7 €. Nous ne le faisons pas, mais nous avons un équilibre budgétaire à respecter. Nous avons décidé de prendre la différence à notre charge, et retirer le pain. »
Pourquoi le pain ? Celui-ci serait moins consommé : « Nos agents le retrouvent souvent dans l’évier ou à la poubelle », avance Jean-Michel Le Conte. Par ailleurs, les repas sont livrés quatre fois par semaine, donc « des menus livrés le jeudi sont consommés le vendredi ou le samedi, et le pain durcit ».
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Le CCAS estime aussi que les retraités peuvent se faire apporter une baguette par leur aide-ménagère ou des proches, et, pour ceux qui sont plus autonomes, « il y a suffisamment de boulangeries à Lisieux pour en trouver à quelques dizaines ou centaines de mètres » de son domicile.
Le conseil d’administration a préféré ne pas toucher au reste du plateau pour « privilégier la variété des équilibres » et « ne pas baisser la qualité des repas ».
Un « épiphénomène »
« À part deux bénéficiaires, aucun ne s’est plaint », souligne le directeur, étonné par l’ampleur médiatique nationale prise par cette histoire : « Je comprends que le pain est un produit culturel. Mais on ne peut pas limiter notre action à cet épiphénomène, c’est un peu dur et c’est trop réducteur. »
Il poursuit : « L’action sociale à Lisieux, c’est un budget de 7 millions d’euros et 150 agents sur le terrain. Le portage de repas, c’est un service que nous rendons. C’est valorisant de maintenir les personnes à domicile, même si cela a un coût pour le CCAS. »
Jean-Michel Le Conte s’attend à de nouvelles augmentations des marchés publics relatifs aux aliments cette année, mais « le CCAS va les absorber » pour « ne pas les impacter » sur les bénéficiaires, assure-t-il.