
Le panneau annonçant le démarrage des travaux est encore sur le bord de la chaussée. Planté près du pont de Guidreau au-dessus de la Maine. Totalement sali. Et grossièrement tagué pour effacer les dates et les montants. Des informations prévoyaient notamment un début de mise en route pour fin 2019 après un investissement de 13 millions d’euros.
Venant de l’autoroute A 83 par la campagne d’Aigrefeuille-sur-Maine, il devait se poursuivre jusqu’à Clisson sur 11km en évitant le bourg de Saint-Lumine-de-Clisson. Et même filer jusqu’à Ancenis en contournant Mouzillon et Vallet. Objectif : tracer une liaison directe pour les véhicules voulant échapper au périphérique nantais.
Cette route ne se fera pas. Le conseil départemental de Loire-Atlantique ne l’a pas inscrit dans ses priorités de la décennie.
Ce n’était pas inscrit d’ici 2027. Maintenant, on nous emmène à plus de dix ans. C’est un projet abandonné, c’est tout.
Un élu local, qui bien que n’ayant pas reçu d’écrit officiel, bien conscient que d’ici là, « les contraintes environnementales seront encore plus drastiques pour réaliser un tel équipement ».
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Le maire d’Aigrefeuille-sur-Maine n’avait de toute façon que peu d’espoir. « Quand j’ai rencontré monsieur Ménard (ndlr. le président) à l’issue des élections départementales, on savait », assure-t-il.
Néanmoins, cette décision est lourde de sens. Il y a quand même eu de nombreuses dépenses et beaucoup de temps passés. Rien que pour l’aménagement foncier, on est à plus de deux ans de travail et un million d’euros dépensés. Sans compter l’entretien des terrains qu’il faudra assurer désormais. Je sais que ce n’est pas grand-chose, mais cette somme aurait pu servir à autre chose. Et puis on a déplacé des exploitations agricoles, ce n’est pas rien.
Les communes traversées pas contactées
A Saint-Lumine-de-Clisson, cet abandon fait craindre pour la sécurité des piétons, compte tenu de l’intensification de la circulation. Selon les chiffres de trafic dans le département, ce sont 6 292 véhicules qui passaient quotidiennement dans le bourg en 2018 (contre 4 978 en 2013), avec une part de poids lourds qui a grimpé de 211 à 350.
Il ne faut pas oublier que les élèves des deux écoles marchent le long de cet axe pour se rendre en classe.
« Les instances nous disent de privilégier le vélo. Des cabinets nous invitent à apaiser et végétaliser davantage nos bourgs. Mais avec des décisions comme celle-ci, c’est une équation compliquée. On n’est pas en sécurité pour des déplacements doux. Et si c’est pour faire des aménagements qui seront dégradés… »
Une élue déçue également de la forme qu’a prise cette annonce. « Nous sommes les premiers concernés, un entretien avec les élus locaux pour expliquer, c’est toujours mieux. On n’a rien eu. On n’est pas venu nous voir, on ne nous a pas téléphoné« .
Seul le tronçon allant à l’autoroute…
Dans l’état actuel du calendrier présenté par le conseil départemental, seul le tronçon entre le giratoire de la Croix-Moutard et le péage de l’autoroute A83 à Montbert sera réalisé. « Et encore parce qu’il y a deux ouvrages réalisés et qu’il y a un bras mort en venant de Clisson du fait de l’arrêt net du chantier…, exprime Jean-Guy Cornu, maire d’Aigrefeuille. On ne peut pas laisser ça comme ça éternellement. Sinon, je ne suis pas certain que cette liaison d’un peu plus de 4 km serait aménagée. Son intérêt demeure minime sans le reste ».
Mais le président de la communauté d’agglomération ne s’attend pas à des coups de pelleteuse avant 2028. « On m’a dit qu’il y avait de nouvelles études environnementales à réaliser du fait de l’évolution de la législation. Et surtout 5 hectares de renaturation pour compenser ce projet du fait de la loi Climat et résilience et du principe du zéro artificialisation nette ». Dans un rayon englobant les communes voisines d’Aigrefeuille-sur-Maine (Remouillé, Montbert, Maisdon-sur-Sèvre et même Château-Thébaud), les municipalités doivent trouver ce niveau de surface à débitumer (friches…). Un autre chemin semé d’embûches.

« Une déception », « une aberration »
C’est une vraie déception.
Le représentant du canton se faisait aussi l’écho « des acteurs économiques ». « On peut comprendre que cela aurait été, de toute façon très difficile de trouver une vingtaine d’hectares de compensation au titre du principe du zéro artificialisation nette, mais je ne suis pas certain que cela ne va pas entraîner d’autres difficultés majeures. Comme la sécurité« . C’est pourquoi, le maire de Gétigné veut que « rapidement des décisions soient prises pour réaliser des aménagements locaux« .
Dans ce dossier, on veut opposer voitures et vélos. On a besoin d’axes pour les deux modes de transport. Encore plus en campagne. Il y a un peu d’idéologie politique derrière cette décision, c’est bien dommage. La gauche a voulu faire plaisir à son aile écologiste. Mais encore une fois, d’autres soucis vont apparaître.

Seul le maire de Clisson, Xavier Bonnet, voulait encore « y croire« un peu.
C’est une aberration d’abandonner ce projet. Il y a une totale maitrise foncière, c’est ce qui est demandé par les usagers de la route et les habitants des bourgs traversés et ce serait un non-sens de ne faire que le seul barreau de l’autoroute au Guidreau.
L’élu craint que « les accidents mortels se multiplient sur l’actuel axe ». Cela signifie aussi pour Clisson que l’absence de cette nouvelle route enterre le contournement sud de cette ville qui devait servir à soulager la zone industrielle de Tabari et le boulevard Pierre et Marie Curie. Le schéma routier envisagé au siècle dernier a été détricoté.