
Dans l’Ouest de Toulouse, une partie des habitants gronde et plutôt fort en ce début d’année…
Très précisément, ce sont une partie des habitants de la communauté de communes Grand Ouest Toulousain, qui rassemble 7 communes dont Plaisance-du-Touch, Léguevin et la Salvetat-Saint-Gilles, qui sont en colère.
L’objet de leur courroux ? La mise en place de la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères Incitatives (TEOMI) au 1er janvier 2023. Cette nouvelle tarification de l’enlèvement des ordures modifie en effet le mode de calcul des frais d’enlèvement. À la part fixe, basée sur la valeur locative du logement, s’ajoute en effet une part incitative décomposée en un forfait de base avec un certain nombre de levées de bac, auquel s’ajoute un coût supplémentaire pour chaque levée de bac effectuées en dehors du forfait.
Baisse drastique des levées annuelles
Ayant pour objectif de faire baisser le volume des déchets ramassés pour chaque habitant de la communauté de communes, les élus ont choisi de drastiquement revoir à la baisse le nombre de levées pour chaque foyer.
Pour ne payer que le forfait de base dans la nouvelle part incitative, chaque foyer doit s’astreindre à ne sortir sa poubelle que dix fois par an… En clair, s’ils ne veulent pas payer les 10 euros supplémentaires prévus pour chaque levée en dessus des dix inclues dans le forfait de base, chaque foyer doit désormais sortir sa poubelle toutes les… cinq semaines.
Des habitants en colère : « C’est du racket »
Une situation qui a fait littéralement exploser certains habitants qui déversent leur colère sur les réseaux sociaux.
« En hiver ça peut aller, mais en été non, bonjour les odeurs les rongeurs et autre bestiole. En plus, où sont les économies ? Les camions ne savent pas qui sort la poubelle donc tourne pour rien. Pourquoi pas une tournée tous les 15 jours ou alors, au lieu de payer à la levée payer au poids », propose Anne-Marie.
« Ce n’est pas une taxe mais du racket », estime de son côté Jean-Bertrand.
« Dix levées par an c’est bien trop peu , et ce même si nous pouvons mettre plus de choses dans le bac de recyclage. L’été, entre les odeurs, les rats, les chats et chiens qui vont se régaler des poubelles débordantes, les villes seront vite des poubelles à ciel ouvert. Quand au coût des levées supplémentaires, c’est du racket manifeste », relève Sylvie.
Une pétition en ligne
Sur internet, une première pétition « pour une nouvelle Teomi » a été lancée. Elle a recueilli 482 signatures.
Pour le collectif Actions pour Lévignac à l’origine de cette initiative, « les habitants du Grand Ouest ont été mis devant le « fait accompli », sans véritable consultation et possibilité d’adapter et modifier le projet ». Pour lui, « la fréquence et la distribution des levées soulèvent beaucoup d’interrogation » et « la tarification des levées, bien au-dessus du niveau moyen connu, n’a pas fait l’objet d’un début de justification ».
Environnement et économies
Philippe Guyot, maire de Plaisance-du-Touch, et président de la communauté de communes constate effectivement que « beaucoup de gens sont perdus et n’ont pas assimilé le nouveau système » et avoue d’emblée une forme de regrets :
« Ce qu’ils ont compris, c’est qu’ils faut sortir le bac le moins souvent possible. Quant aux conditions tarifaires et au nombre de levées pour rentrer dans le forfait de base, l’information leur est arrivée trop tard », relève le président… qui ne veut pourtant pas revenir sur le processus enclenché, ni le ralentir. Il s’en explique :
« La mise en place de la TEOMI, c’est un gros défit et la réforme locale la plus importante du mandat car elle demande aux habitants de changer leurs habitudes. Cette réforme, elle part de deux constats. D’une part de celui qu’en dépit de l’instauration du tri sélectif depuis plus de 20 ans, et des nombreux messages incitatifs envoyés pour que chacun réduise sa part de déchets, le nombre de kilos de déchets par habitant n’a cessé de croître sur notre territoire (245 kg/habitant, ndlr). D’autre part, que depuis deux ou trois ans, le budget des ordures ménagères est déficitaire et qu’il faut à chaque fois l’équilibrer. Clairement, avec la mise en place de la Teomi, nous devons répondre aux enjeux environnementaux tout en maîtrisant les coûts de collecte et de traitement des déchets avec la hausse des charges (carburant, traitement des déchets…) ».
Les habitants avertis
Dans les faits, pour les habitants de ces communes à l’Ouest de Toulouse, la Teomi est effective depuis le 1er janvier et elle nécessite que chaque bac de chaque foyer soit pucé. Et d’ores et déjà, chaque habitant est soumis au rythme de dix levées par an. Ceux qui sont restés sur l’ancien rythme d’une sortie de leur bac chaque semaine viennent de recevoir un courrier de la collectivité. Ils peuvent y lire cet avertissement :
Nous avons constaté qu’au cours du mois de janvier 2023, vous avez présenté votre bac trois fois ou plus sur les cinq collectes possibles. Si vous continuez à présenter votre bac au même rythme tout au long de l’année, votre taxe 2024 risque d’augmenter très fortement.
Des usagers s’étranglent
Et effectivement, certains usagers, en utilisant le simulateur mis à disposition par Grand Ouest Toulousain s’étranglent. S’ils veulent conserver le même niveau de service, soit une levée par semaine, leur facture va exploser…
C’est le cas de Carole, une habitante de la Salvetat-Saint-Gilles, qui poste un long message sur Facebook :
Pour moi 286 euros en 2022 et 972 euros en 2023. Un véritable scandale ! Beaucoup de Salvetains n’ont pas dû lire le document qui parle des dix levées de poubelles par an, au vu de ce que je vois sur la Salvetat ! Les poubelles restent dehors ! Bonjour la surprise pour eux en 2024 ! Nos poubelles valent de l’or à la Salvetat-Saint-Gilles ! Messieurs les bureaucrates, comment n’avez vous pas pensé à nos malades, nos ainés, nos enfants qui ont des protections contre l’incontinence et dont nous ne pouvons pas nous passer pour leurs conforts et leurs hygiènes !
Cette habitante pourra sans doute exprimer son avis à la cinquième réunion publique prévue justement à la Salvetat-Saint-Gilles, ce mardi 7 février.
« Baisse de la facture de 20 à 30% »
Pour Philippe Guyot, le processus est certes contraignant mais il est acceptable aussi bien sur le plan financier que sur les modalités de tri.
« L’expérience des communautés de communes qui ont commencé le dispositif à 20-30 levées par an montre que ce choix ne fait pas baisser le poids des ordures ménagères. D’où notre choix d’abaisser à dix le nombre de levées par an et de le faire en accompagnant les habitants avec l’extension des consignes de tri, le développement du compostage individuel par la remise des composteurs gratuitement et le développement du compostage collectifs.
Sur le plan financier, la future facture de l’usager baissera, par rapport à sa facture actuelle, jusqu’à 12 à 15 levées par an. Ceux qui arriveront à réduire leurs déchets et à rester sur le volume de dix levées par an verront leur facture baisser de 20 à 30%.
Toulouse Métropole a écarté l’idée
Facturer le ramassage en fonction du poids des déchets produits ou en fonction du nombre de levées des bacs à ordures de chaque foyer, Toulouse Métropole l’a étudié puis écarté. Mais une autre collectivité est en passe de le réaliser en Haute-Garonne. C’est le cas de la collectivité Cœur de Garonne, au sud-ouest de Toulouse, qui déploie actuellement le matériel pour lancer ce dispositif au printemps 2023.
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Depuis 2016 au Sicoval : premier bilan
Le Sicoval, la communauté de commune du sud-est toulousain (Labège-Castanet, ndlr) a mis en place la taxe incitative dès 2016 avec des résultats certains à la clé.
En 2012, chaque habitant de ce territoire produisait 232 kg de déchets par an. En 2021, les ordures ménagères représentent 154 kg par habitant.
La méthode a été, elle, bien plus douce qu’à l’Ouest toulousain puisque le nombre de levées du forfait de base a d’abord été établi à 26 levées. « Depuis trois-quatre ans, en moyenne, un foyer sort son bac entre 18 et 20 fois par an, explique Elodie Delmas, directrice des relations usagers gestion des déchets et environnement.
Au plan économique, cette progressivité, selon le Sicoval, permet de rester sur des tarifs contenus à ceux qu’ils étaient au début du XXIe siècle. « Les coûts du service ont été maitrisés et 70% des habitants ont vu leur facture baisser ».