
Un record, selon les responsables de l’intersyndicale mayennaise contre la réforme des retraites. Ce samedi 11 février 2023, en début d’après-midi, les opposants à cette réforme se sont rassemblés square de Boston, à Laval, pour une quatrième journée de mobilisation. Selon les syndicats, ils étaient 12 100 à défiler entre le pont de l’Europe et le pont d’Avesnières. C’est 2 000 de plus que le 31 janvier. La police a quant à elle comptabilisé 8 000 manifestants.
Parmi les manifestants, des jeunes pour qui cette journée marque leur entrée dans le mouvement. C’est le cas de Théotime et Sterenn, 19 ans tous les deux et étudiants à Rennes. Leurs études les avaient dissuadés de participer aux précédentes manifestations. « Quand on est boursiers, on ne peut pas louper de TD sous peine de se voir supprimer les bourses. »

Pourtant, tous deux soutiennent un mouvement qui concerne directement leurs parents. « Mon père a 51 ans, il est carreleur« , explique Sterenn, qui s’inquiète à l’idée de le voir faire ce métier deux ans de plus que prévu. « C’est un métier physique, il a déjà des tendinites aux bras, des problèmes aux genoux. »
Zoé, 20 ans, présente dans le cortège, a aussi une bonne raison de ne pas avoir participé aux précédentes journées de mobilisation. « J’étais en stage, c’est compliqué de faire grève », sourit-elle. En deuxième année d‘école d’infirmière, ces stages font d’elle une témoin privilégiée de l’impact éventuel de cette réforme sur un corps de métier déjà sous tension. « À 50 ans, mes collègues en ont déjà ras le bol. » Mais pour elle, les jeunes sont aussi concernés par cette réforme, en raison d’un rapport au travail qui évolue.
Le travail n’est plus notre priorité. On n’a plus envie de se tuer à la tâche, comme ont pu le faire les générations précédentes.

Dans ce cortège lavallois, les jeunes travailleurs se sentent eux aussi concernés, à l’image de Nicolas, chargé d’affaire de 26 ans dans le secteur public. Lui n’a pas fait grève lors des précédentes journées.
J’aurais pu faire grève, mais j’ai choisi de privilégier ma mission et de ne pas planter mes rendez-vous. Il y a aussi une certaine peur d’être jugé : faire grève, manifester est parfois mal vu. Il y a une certaine pression sociale.

Pourtant, le jeune homme en est convaincu, cette réforme est injustifiée. « Elle n’a ni queue ni tête, tous les arguments avancés par ses défenseurs sont systématiquement démontés. » Alors, même si lui est « pessimiste » sur sa propre retraite quand le moment sera venu, il a décidé de rejoindre le mouvement, par « solidarité ».
Dimitri, 25 ans, travaille quant à lui « dans la construction ». Pour lui aussi, faire grève était « délicat », mais il a sauté sur l’occasion que représente une manifestation le samedi pour faire venir des amis. « Ils n’ont pas été difficiles à convaincre. » Pour eux, cette réforme est « emblématique » : s’y opposer, c’est « montrer au gouvernement qu’on n’est pas d’accord, qu’on n’a pas envie de crever au travail. »
Tous se disent prêts à continuer de manifester, quitte à se mettre en grève pour ceux qui le peuvent.