
Avez-vous déjà eu entre les mains ces fameuses cartes postales du début du siècle dernier ? Vous voyez, ces cartes postales montrant, en noir et blanc bien sûr, les rues d’une commune en 1910 ou à l’amorce des années 1920, où les gens posent dans la rue en regardant patiemment le photographe. Vous êtes-vous demandés de qui il s’agissait, de leur histoire, pourquoi ils étaient là à ce moment précis ?
Serge Ferry, un habitant de Tournan-en-Brie (Seine-et-Marne), s’intéresse de près à ces questions. Et il faut dire qu’en matière de cartes postales anciennes, il s’y connaît. « Depuis que j’ai 11 ans, je suis collectionneur de cartes postales », récapitule celui qui est aujourd’hui septuagénaire. Sur la fin de sa carrière professionnelle, l’homme s’est même mis à vendre ses cartes. « Je m’y connaissais tellement, que j’en ai fait mon métier. Je suis devenu négociant en documents iconographiques, avance-t-il. Les gens venaient de loin pour m’en acheter ou pour avoir des renseignements ».
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Une photo de 1914
Et un jour, le collectionneur est tombé sur une carte postale qui ne l’a pas laissé indifférent. Mais avant d’en dire plus, que montre cette photographie ? Elle met en scène un homme, visiblement un garde, auprès de sa paillotte-guérite sous un pont. « J’ai immédiatement reconnu le pont sur la Marsange« , résume le Tournanais qui a entamé une collection sur cette commune depuis son arrivée en Seine-et-Marne il y a près de 20 ans.
Passionné par l’histoire avec un grand H, il s’est alors lancé dans des recherches pour tenter de découvrir le rôle de cette personne ainsi que son identité. Et ton son travail a enfin porté ses fruits ! « J’ai découvert que cette photographie datait de 1914 et que la personne dessus était un garde des voies de communication », explique Serge Ferry.
Ce dernier met ainsi la main sur la mission de ces gardes d’un autre temps. « L’organisation de surveillance des voies ferrées aurait été mise en place en 1887 par le Général Boulanger. Elle est composée de militaires, mais aussi de civils, note l’historien amateur. Au moment de la mobilisation générale de la Première Guerre mondiale, 200 000 gardes des voies de communication sont déployés dans tout le pays. Ils patrouillent en binôme ou sont en factions avec des tours de garde de quatre heures assurant ainsi la surveillance des gares, des voies ferrées, de leurs ouvrages, des centres d’aiguillage, etc ».
Les gardes des voies de communication étaient pour la plupart âgés. Il s’agissait régulièrement d’hommes de plus de 40 ans, allant jusqu’à près de 50 ans.

« C’était un Briard »
La photo d’époque masque naturellement les couleurs. Cependant, Serge Ferry dresse le portrait vestimentaire des gardes de l’époque. « Ils possédaient un habillement réglementaire de l’infanterie, c’est-à-dire un képi, une capote, une veste, un pantalon garance couleur rouge très visible par l’ennemi, une paire de brodequin et un brassard », liste-t-il.
Malgré des recherches plus poussées, il n’a pas réussi à donner un nom à l’homme à la moustache grise qui pose fièrement avec son fusil équipé d’une épée-baïonnette. Toutefois, il assure qu’il doit s’agir d’un Briard. « Chaque garde évoluait à moins de deux heures de marche ou 10 km de son domicile. Du coup, il pouvait habiter Ferrières, Gretz-Armainvilliers ou les alentours. Bref, on peut dire à 99% qu’il s’agissait d’un Briard« , pointe Serge Ferry. Avant de poursuivre : « Cette photographie très rare, dont il ne doit y avoir qu’une ou deux reproductions, montrent que la Brie possédait des gardes de voies de communication. Ce devait être l’un des uniques postes du coin ».
Comme quoi, il n’y a pas que ce qui est écrit au dos de la photo qui est important sur une carte postale. L’image en dit même souvent plus que les écrits…