
Anne Paillard est l’une des rares élues sourdes en France, depuis 2020. Elle vit à Congrier (Mayenne). Pour l’aider dans sa compréhension au sein du conseil municipal, un interprète en langue des signes assure une prestation. Elle témoigne le 10 février 2023.
Pascal di Piazza, interprète en langue des signes à Rennes (Ille-et-Vilaine) vient une fois par mois assisté Anne Paillard quand le conseil municipal de Congrier se réunit.
« La langue des signes est une langue étrangère à part entière, structurée, ayant sa propre culture, ses spécificités en fonction des pays. C’est une option au Bac en France, mais c’est la deuxième langue la plus parlée aux États-Unis avant l’espagnol ».
Pascal di Piazza parcourt le monde là où on a besoin de ses oreilles et de ses mains : les théâtres, conseils régionaux, festivals, et le conseil municipal à Congrier.
« J’ai eu le coup de foudre pour cette langue en voyant deux adolescentes la parler dans mon ambulance, se rappelle-t-il. C’était il y a 30 ans. J’ai quitté mon métier ».
Il a rencontré Anne Paillard, malentendante à Congrier depuis ses 5 ans à cause d’otites, en 2020, « grâce à un ami artiste de rue invité par les parents d’Anne pour l’anniversaire de leur fille », explique Pascal di Piazza.
Le handicap surmontable
Dans la famille Paillard, l’engagement citoyen est manifeste. Le grand-père d’Anne a été maire de Congrier de 1977 à 1995. Son frère a été élu de 2014 à 2020.
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Anne Paillard, aide à domicile, s’est retrouvée conseillère municipale, en 2020, lorsqu’Anita Rouleau, sa voisine, adjointe au maire à Congrier, lui a proposé de rejoindre l’équipe.
Anne Paillard s’implique dans la commission animation. « Surprise d’être élue, je l’ai été au départ. C’était compliqué avec le Covid », traduit Anita Rouleau, qui parle la langue des signes.
« On a essayé un logiciel de traduction mais ce n’était pas interactif. On a cherché un signeur. »
La commune de Congrier verse une indemnité d’environ 500 € par mois à l’interprète, Pascal di Piazza pour son intervention mensuelle, qui reste « complexe », avoue l’interprète.
Les entendants pas toujours conscients
Il ajoute : « Car les entendants se coupent facilement la parole. Je dois être très attentif, afin qu’Anne ait accès à toute l’information ».
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Et si le tableau interactif aide à la compréhension, « à la fin de la séance, je suis claqué », confie le traducteur de 62 ans, bientôt à la retraite.
Céline Loichet, interprète et accompagnatrice d’apprenants de la langue des signes, va remplacer Pascal di Piazza. « Avec Anne, cela se passe bien. Elle est autonome. » Elle a même appris aux élus des mots en signant « mais ils oublient » peste-t-elle. Elle le fait aussi auprès des écoliers du village.