Il en a parcouru du chemin « le petit garagiste ». Du lancement de Brouzils auto en 2005 à la création d’e-Néo en 2019, Jérémy Cantin a tracé sa route.
Le pionnier de la décarbonation de véhicules lourds entend bien passer la seconde en s’installant dans une partie de l’ancienne usine Michelin de La Roche-sur-Yon.
Profitant du renouveau du site autour des mobilités, e-Néo veut industrialiser son process de conversion des moteurs thermiques en électrique (rétrofit).
Pour cela, la PME prévoit d’occuper 6 600 m2 d’ici 2026 pour produire 250 véhicules rétrofités par an : des porteurs, des camions, des tracteurs agricoles et des autobus.
Moteur électrique et pile à combustible
Il y a une réelle demande des transporteurs. Pour y répondre, on souhaite massifier notre production pour optimiser les coûts et rendre nos véhicules plus accessibles.
D’autant qu’après le salon Hyvolution de Paris de février 2023, les feux sont au vert. Les poids lourds rétrofités à base de moteur électrique avec pile à combustible hydrogène ont fait sensation.
« On a réussi à montrer aux professionnels que l’on maitrisait le fonctionnement d’un véhicule lourd. »
Ils leur font déjà confiance
E-Néo a frappé un grand coup dans la microsphère du rétrofit avec son premier tracteur agricole converti à l’hydrogène. L’entreprise Charrier TP leur en a un commandé. L’engin en service depuis le 5 décembre a déjà tracté 700 tonnes. Il est aujourd’hui utilisé sur le chantier d’extension du Port de La Turballe.
Le Conseil départemental de la Vendée prévoit de rétrofiter un gravillonneur de 19 tonnes.
Les transporteurs routiers DB Schenker, Transport Gariou et Transports Derocq ont passé commande pour des camions.
Prolonger la vie des poids lourds
Pour conserver son avance, le Vendéen veut façonner un outil calibré pour répondre aux problématiques de demain. Notamment avec la fin de la production de véhicules thermiques en 2035, voulue par la Commission européenne. Dans ce contexte, e-Néo entend développer à grande échelle ses « solutions de prolongement de la vie des poids lourds ».
Pour mettre en route son usine yonnaise, Jérémy Cantin a confié les clés à Pierre-Emmanuel Turpeau.
L’ex-Bib, en charge de l’amélioration continue au sein de l’équipe de direction jusqu’en octobre 2019, a rejoint les rangs de l’entreprise en qualité de directeur des opérations techniques, industrielles et de la livraison aux clients.
Nouveau départ début avril
La direction et le responsable méthode ont déjà quitté Les Brouzils pour La Roche-sur-Yon. Dans leur sillage, les quatorze salariés devraient rejoindre le nouveau site début avril. Dans un premier temps, le bureau d’études et l’activité prototype occuperont 400 m2.
« Puis le site connaitra une montée en puissance sur 2 500 m2 avec la mise en place du système d’information et la traçabilité associée », détaille Pierre-Emmanuel Turpeau.
Viendra ensuite sur deux ans une phase « de stabilisation du processus d’achat et un rodage de la filière d’approvisionnement pour les piles à hydrogène, les réservoirs et les batteries ».
Le leader sur le marché
Une fois la vitesse de croisière atteinte, l’entreprise embauchera 60 salariés. Progressivement, une campagne de recrutement sera lancée pour former des techniciens de conversion et des managers de production.
À terme, e-Néo prévoit de sortir 250 véhicules par an. Un chiffre atteignable lorsqu’on sait que 296 619 poids lourds sont actuellement en circulation, et que le Vendéen fait figure de leader sur le marché de la décarbonation de véhicules lourds.
La méthode e-Néo
1- A partir de cinq ans d’utilisation, e-Néo peut transformer les véhicules industriels. Une fois passé ce délai, « il n’y a pas besoin de l’accord des constructeurs », précise Pierre-Emmanuel Turpeau, directeur des opérations techniques, industrielles et de la livraison aux clients. Des camions de transports routiers, des tracteurs de travaux publics, des véhicules de collectivités ou des engins spéciaux peuvent être éligibles au rétrofit.
2- La deuxième étape consiste à diagnostiquer le véhicule et à changer toutes les pièces d’usure.
3- Dans un troisième temps, le moteur thermique et le réservoir sont déposés.
4- Puis vient l’étape du positionnement du moteur électrique, des batteries et du prolongateur d’autonomie à hydrogène avec ses piles à combustible, adaptées selon les usages.
5- La cabine est reconditionnée. « C’est un peu comme Back market avec les téléphones reconditionnés. On prend un véhicule ancien, on change les pièces usées et on le remet à neuf. »
6- L’opération s’achève avec l’homologation auprès du Centre national de réception des véhicules (CNRV). « On n’a pas encore le tampon officiel qui nous permet d’avoir des véhicules sur route. Mais d’ici septembre 2023, cela devrait être bon pour les 19 et 26 tonnes », assure Pierre-Emmanuel Turpeau. « La filière est en cours de construction, il est normal d’avoir un certain nombre d’expertises et de garanties. »
